EAF

Publié le par Catherine Picque

 

Des lunettes d'aviateur, des cadrans plein d'aiguilles en dessous de mon horizon,

je navigue à travers une nuée de sigles… 

Une épreuve sur l'Equateur ou une Force aérienne en Afrique…

Tout se mélange, et me voilà pilote de la RAF en partance pour l'AEF.

Pour aider mon fils dans la préparation de son épreuve anticipée de français, j'irais jusqu'en Antarctique… 

Et du TAF dans les TAAF, il y en a ! Nous voilà embarqués pour les rivages glacés des îles Kerguelen ou Crozet pour observer les manchots… 

Pour son esprit scientifique, les hyperboles , métaphores, oxymores et hypotyposes sont aussi palpitantes que les missions d'exploration en Terres Australes et Antarctiques Françaises.

Engoncé dans son scepticisme, comme dans une combinaison polaire, il reste insensible à l'humour picaresque d'un Matamore, à la poésie du cageot abandonné de Francis Ponge.

Quelle ironie d'étudier ces mises en abyme du théâtre et de la poésie avec en trame de fond les reflets nacrés de son intelligence magnificente.

Mon fils est lui-même une œuvre dans l'œuvre.

Comme l'huître de Ponge, il est difficile d'accès,

Comme l'Illusion de Corneille, il est tragique et comique à la fois.

Une perle irrégulière, "barocco" comme nous le dit l'étymologie,

accessible seulement à ceux qui renoncent à manier le couteau à huître.

On ne peut l'admirer qu'en ménageant sa sensibilité.

L'huître

Francis Ponge

L'huître, de la grosseur d'un galet moyen, est d'une apparence plus rugueuse, d'une couleur moins unie, brillamment blanchâtre. C'est un monde opiniâtrement clos. Pourtant on peut l'ouvrir : il faut alors la tenir au creux d'un torchon, se servir d'un couteau ébréché et peu franc, s'y reprendre à plusieurs fois. Les doigts curieux s'y coupent, s'y cassent les ongles : c'est un travail grossier. Les coups qu'on lui porte marquent son enveloppe de ronds blancs, d'une sorte de halos.
A l'intérieur l'on trouve tout un monde, à boire et à manger : sous un firmament (à proprement parler) de nacre, les cieux d'en dessus s'affaissent sur les cieux d'en dessous, pour ne plus former qu'une mare, un sachet visqueux et verdâtre, qui flue et reflue à l'odeur et à la vue, frangé d'une dentelle noirâtre

Photo Catherine PICQUE

Street Art

Montpellier

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