Battements

Publié le par Catherine Picque

 

La dernière fois que j'avais entendu ce bruit, c'était chez l'obstétricien quand j' étais enceinte de mon petit dernier, huit ans déjà... la première rencontre avec le palpitant de son enfant .Une vie qui gicle dans votre paysage sonore, sans prévenir et qui ressemble plus à un glouglou d'évier qu'aux orgues du bonheur, mais on est tellement émus en tant que parents qu'on ne le remarque même pas… et là, au détour d'une visite chez le cardiologue pour ma mère, j'entends à nouveau les battements qui m'ont bercée dans le liquide amniotique pendant mes premiers mois.

 Un rendez-vous avec la vie qui rend ce énième accompagnement médical si inédit… Une évidence oubliée qui saute aux yeux, ou plutôt aux oreilles ; ce muscle cardiaque m'a irriguée pendant neuf mois, puis il s'est serré à chaque fois qu'un événement important me concernait. Cette vieille dame qui ne sait pas toujours que je suis sa fille m'a portée, allaitée, consolée… et maintenant c'est à moi d'être là pour la rassurer, lui tenir la main, lui acheter ses vêtements, et lui réexpliquer inlassablement, ce qu'on fait, où on est...Que ce ne sera pas long, que cela ne fait pas mal…

 L'acceptation de ces obligations a été longue et difficile, à l'angoisse, a succédé la colère d'être contrainte par le destin d'assumer seule cet accompagnement. Par le miracle de l'échographie, la sagesse confucéenne arrive à trouver un écho en moi. Tout prend un sens, quand on câline son enfant, on ne le fait pas en espérant qu'il s'occupera de vous plus tard, on chérit juste le miracle de la vie. Quels que soient les ratés de notre histoire, je caresse ta main dans la salle d'attente, je te réponds "moi aussi, j'ai de la chance de t'avoir", quand tu me confies "Je ne sais pas ce que je ferais sans toi". Je n'essaye plus de déterminer  à qui tu penses parler, car je suis juste celle dont tu as besoin, une mère.

Publié dans Le Registre

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